#19. GARDEN-SITTER
Il était seul à Paris. Toute la famille avait mis les voiles pour les vacances. Un stage de trois mois le retenait dans la capitale jusqu’en octobre. Cette indépendance forcée n’était pas pour lui déplaire. Les repas constituaient désormais sa seule obligation domestique. Comme il peinait quotidiennement à sortir de son lit dans les temps impartis pour arriver à l’heure sur son lieu de travail, le petit déjeuner se soldait la plupart du temps par un croissant, acheté en bas de l’immeuble, et un café, une fois arrivé devant son écran d’ordinateur. Quant au diner, il allait au plus simple : pâtes ou pizza, au choix. Ça manquait de verdure ! Surtout qu’à midi, c’était sandwich ou kebab ! Sa mère n’approuverait pas. Elle devait d’ailleurs se douter de quelque chose car il l’avait eu plusieurs fois au téléphone ou par texto et à aucun moment elle n’avait posé la question de ses menus, ce qui était suffisamment inhabituel pour qu’il le relève. Il était libre. Libre aussi de retrouver ses potes après le boulot autour d’une pinte au pub. Libre de disposer de ses week-ends à droite et à gauche avec les mêmes potes, ou d’autres. Libre de se coucher à l’heure qui lui convenait et ce même si la contrainte du réveil lui intimait de ne pas trop abuser et de ne pas passer la nuit en ligne avec toujours les mêmes potes, ou d’autres. Paris avait connu plusieurs épisodes de canicule cet été-là et le jardin en pots de la cour dont on lui avait confié la garde avait soif. Aussi, il avait du se soumettre à l’arrosage plus qu’il n’avait pensé que ce serait nécessaire. Au début, c’était une vraie corvée qu’il s’empressait d’exécuter tout de suite en rentrant pour mieux s’en débarrasser et ne pas l’oublier. Puis, peu à peu, les jours brûlants se succédant, il s’était surpris à s’attarder à la tâche, à aimer regarder tiges et feuilles se regonfler d’eau et les fleurs relever la tête dans l’ombre du soir naissant. Parfois, dans la journée, au plus fort de la fournaise, il se prenait à penser aux plantes et à s’inquiéter pour elles. Puis, à une ou deux reprises, alors que l’orage finissait par déchirer la torpeur installée sur la ville, il avait éprouvé un soulagement. Les grosses gouttes plates devaient faire danser les anémones du Japon.
Il était seul à Paris. Toute la famille avait mis les voiles pour les vacances. Un stage de trois mois le retenait dans la capitale jusqu’en octobre. Cette indépendance forcée n’était pas pour lui déplaire. Les repas constituaient désormais sa seule obligation domestique. Comme il peinait quotidiennement à sortir de son lit dans les temps impartis pour arriver à l’heure sur son lieu de travail, le petit déjeuner se soldait la plupart du temps par un croissant, acheté en bas de l’immeuble, et un café, une fois arrivé devant son écran d’ordinateur. Quant au diner, il allait au plus simple : pâtes ou pizza, au choix. Ça manquait de verdure ! Surtout qu’à midi, c’était sandwich ou kebab ! Sa mère n’approuverait pas. Elle devait d’ailleurs se douter de quelque chose car il l’avait eu plusieurs fois au téléphone ou par texto et à aucun moment elle n’avait posé la question de ses menus, ce qui était suffisamment inhabituel pour qu’il le relève. Il était libre. Libre aussi de retrouver ses potes après le boulot autour d’une pinte au pub. Libre de disposer de ses week-ends à droite et à gauche avec les mêmes potes, ou d’autres. Libre de se coucher à l’heure qui lui convenait et ce même si la contrainte du réveil lui intimait de ne pas trop abuser et de ne pas passer la nuit en ligne avec toujours les mêmes potes, ou d’autres. Paris avait connu plusieurs épisodes de canicule cet été-là et le jardin en pots de la cour dont on lui avait confié la garde avait soif. Aussi, il avait du se soumettre à l’arrosage plus qu’il n’avait pensé que ce serait nécessaire. Au début, c’était une vraie corvée qu’il s’empressait d’exécuter tout de suite en rentrant pour mieux s’en débarrasser et ne pas l’oublier. Puis, peu à peu, les jours brûlants se succédant, il s’était surpris à s’attarder à la tâche, à aimer regarder tiges et feuilles se regonfler d’eau et les fleurs relever la tête dans l’ombre du soir naissant. Parfois, dans la journée, au plus fort de la fournaise, il se prenait à penser aux plantes et à s’inquiéter pour elles. Puis, à une ou deux reprises, alors que l’orage finissait par déchirer la torpeur installée sur la ville, il avait éprouvé un soulagement. Les grosses gouttes plates devaient faire danser les anémones du Japon.