Sèverine Harzo

Journaliste et autrice

#11. AUBE


   
      Le soleil s'était enfin glissé derrière les peupliers et elles avaient décidé de tirer le lit sur la terrasse au-dessus du toit. Tout le jour, l'air avait été immobile, la chaleur lourde, écrasante. L'une allait du transat au canapé, puis du canapé au transat, hésitant entre la fraicheur relative de la maison et l'espoir d'un souffle dans l'ombre des lilas, là où l'autre était demeurée allongée à même l'herbe coupée, s'efforçant d'y percevoir l'humidité de la terre. Il faisait encore chaud mais le faible bruissement des feuilles au faîte des grands arbres suffisait à donner l'illusion d'un courant d'air. Le fleuve tout proche s'éveillait à la nuit. Elles dormirent mal. Elles avaient mis la petite entre elles, et, scrutant les étoiles, avaient tendu l'oreille vers la vie aquatique. Le croassement des grenouilles parfois troublé par le bruit d'un plongeon avait progressivement couvert le chant des grillons. Au loin, de temps à autre, on percevait le moteur d'une péniche. La mère et la fille avaient chuchoté longtemps dans la semi-obscurité, par dessus l'enfant endormie. Puis l'aube était venue, et avec le piaillement soudain des oiseaux, des perles de rosée s'étaient déposées sur leurs oreillers. Le soleil allait bientôt poindre derrière le toit voisin.